Société civile de construction-vente insolvable : Peut-on agir contre ses associés ?

Cabinet CMC AvocatActualités juridique, Droit de l’immobilier et de la construction

Dans le cadre de la mise en œuvre d’un programme immobilier, il est courant pour un promoteur de constituer une société civile de construction-vente (SCCV) ayant pour objet l’achèvement de travaux de construction avant de proposer à la vente les immeubles bâtis à de potentiels acquéreurs.
Pendant la réalisation des travaux ou après leur achèvement, la SCCV peut avoir contracté des dettes qu’elle est dans l’incapacité financière de payer, incitant les créanciers sociaux à s’interroger sur les recours dont ils disposent à l’égard des associés de la société civile défaillante.

L’application d’un régime dérogatoire au droit commun propre aux sociétés civiles de construction-vente (SCCV)

Les associés d’une société civile de droit commun sont tenus indéfiniment à l’égard des tiers du passif social sur leur patrimoine et à proportion de leurs droits sociaux au sens de l’article 1857 du Code civil.
Le créancier de la société civile ne peut donc poursuivre le paiement de la dette sociale contre un associé « qu’après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale » (article 1858 du Code civil).
Autrement dit, le créancier ne pourra agir en paiement contre les associés d’une société civile qu’après avoir épuisé tous les recours contre la société pour obtenir le recouvrement de sa créance en apportant la preuve de l’inefficacité des poursuites intentées contre la SCCV insolvable.
Par l’entrée en vigueur de l’article L.211-2 du Code de la construction et de l’habitation à compter du 8 juin 1978, le législateur a mis en place un régime dérogatoire au droit commun applicable aux seules sociétés civiles de construction-vente.
Cet article prévoit en son deuxième alinéa que les créanciers de la société « ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu’après mise en demeure adressée à la société et restée infructueuse », soit lorsque la SCCV ne s’est pas volontairement exécutée à l’expiration du délai raisonnable octroyé par son créancier dans le cadre de son courrier de mise en demeure.
Ainsi, le législateur de 1978 a simplifié les modalités de mise en œuvre du recours offert au créancier à l’encontre des associés de la SCCV.

Les conditions de mise en œuvre de l’obligation aux dettes sociales des associés de la SCCV défaillante

Bien que considérablement simplifié, le recours offert au créancier d’une SCCV à l’égard de ses associés reste difficile à mettre en œuvre dans la pratique ; les associés de la SCCV étant considérés par la Haute juridiction comme des débiteurs subsidiaires et donc non-solidaires du passif social envers les tiers (Cass 3ème civ, 31 mai 1995, n°93-11.442).
Après avoir préalablement et sans succès mis en demeure la SCCV défaillante, le créancier de cette dernière ne peut exercer de recours contre ses associés qu’en justifiant de l’existence de cette dette sociale :

  • soit par l’aveu ou l’acceptation expresse de la dette par les associés de la SCCV ;
  • soit par l’obtention d’un titre exécutoire, tel qu’un acte notarié revêtant la formule exécutoire ou un jugement devenu définitif, antérieur à la poursuite des associés (Cass 3ème civ, 3 novembre 2011, n°10-23.951).

Toutefois, il n’est pas exigé que ce titre soit définitif ; la Troisième Chambre civile de la Cour de cassation ayant considéré qu’une ordonnance de référé condamnant la société au paiement d’une somme est suffisante (Cass 3ème civ, 17 juillet 1988, Bull. civ. III n°37, p.20).

Finalement, le créancier qui souhaite obtenir le recouvrement de sa créance détenue à l’égard d’une SCCV défaillante auprès de ses associés devra impérativement et préalablement avoir :

  • mis en demeure de manière infructueuse la SCCV,
  • engagé des poursuites à l’encontre de la SCCV et obtenu un titre exécutoire provisoire ou définitif.