REVIREMENT DE JURISPRUDENCE : L’OUVERTURE D’UNE PROCEDURE DE LIQUIDATION JUDICIAIRE N’ENTRAINE PLUS LA RESILIATION AUTOMATIQUE DU COMPTE COURANT

Cabinet CMC AvocatDroit de l’immobilier et de la construction

Par un arrêt du 11 septembre 2024, la Haute Juridiction opère un revirement de jurisprudence important en jugeant que l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire n’entraîne plus la résiliation automatique du compte courant du débiteur. La caution n’est donc plus tenue du solde du compte par l’ouverture de la procédure.

Cass. com., 11 sept. 2024, n° 23-12.695

 

LE PRINCIPE DE CONTINUATION DES CONTRATS EN COURS AU JOUR DE L’OUVERTURE DE LA PROCEDURE COLLECTIVE

Les dispositions du Code de commerce ont vocation à protéger le débiteur en procédure collective de toute résiliation d’un contrat en cours au jour de l’ouverture de la procédure.

L’article L.641-11-1-I du Code de commerce prévoit que, nonobstant toute disposition légale ou contractuelle, « aucune indivisibilité, résiliation ou résolution d’un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l’ouverture ou du prononcé d’une liquidation judiciaire ».

Le défaut d’exécution du débiteur n’ouvre droit au profit des créanciers qu’à déclaration au passif ; de sorte qu’une clause prévoyant que le contrat serait résilié du seul fait de l’ouverture d’une procédure collective est réputée non-écrite.

Etant précisé qu’il en va de même pour la procédure de sauvegarde judiciaire aux termes de l’article L.622-13 du Code de commerce, ainsi que pour la procédure de redressement judiciaire par renvoi de l’article L.631-14 du même code.

 

LE SORT DES COMPTES BANCAIRES DE LA SOCIETE EN PROCEDURE COLLECTIVE

L’ouverture d’une procédure collective fait débuter une période dite « d’observation » au cours de laquelle il est fait une analyse de la situation active/passive du débiteur.

Pendant cette période, le débiteur a interdiction formelle de s’acquitter des dettes nées antérieurement à la date de publication du jugement d’ouverture de la procédure, et obligation de s’acquitter à échéance de ses dettes postérieures.

Pour des raisons purement pratiques, les établissements bancaires ont pour habitude de clôturer le compte courant du débiteur et ouvrir un compte bancaire dédié à la sauvegarde, au redressement ou à la liquidation judiciaire afin de distinguer les opérations antérieures à la date du jugement d’ouverture de celles postérieures.

En procédant ainsi, le débiteur ne pourra s’acquitter d’une dette antérieure au jugement d’ouverture par simple compensation des sommes inscrites sur le compte bancaire.

Par un arrêt du 13 décembre 2016, la Chambre commerciale de la Cour de cassation avait adopté une position surprenante en confirmant l’arrêt qui jugeait que le compte courant d’une société était clôturé par l’effet de sa liquidation judiciaire et qu’il en résultait que le solde était immédiatement exigible de la caution (Cass.com., 13 décembre 2016, n°14-16.037).

Or, cette interprétation par la Haute juridiction a fait l’objet de vives critiques par la doctrine.

Le compte courant étant un contrat en cours, il n’a donc pas à être clôturé par l’effet du jugement d’ouverture d’une procédure collective tel que le prévoit l’article L.641-11-1-I du Code de commerce.

Par l’arrêt rendu le 11 septembre 2024, la Chambre commerciale de la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence en considérant que l’ouverture ou le prononcé d’une liquidation judiciaire n’entraine plus la clôture automatique du compte courant du débiteur (Cass.com., 11 septembre 2024, n°23-12.695).

Contrairement à la jurisprudence antérieure, le solde du compte bancaire n’est donc plus immédiatement exigible de la caution.

Cet arrêt a un véritable impact sur toutes les procédures en cours initiées à l’encontre des cautions afin d’obtenir le paiement du solde du compte courant du débiteur.

En effet, il appartiendra désormais aux établissements bancaires de se soumettre aux prescriptions de l’article L.641-11-1 du Code de commerce avant d’actionner la caution du débiteur.